[Candidature acceptée] Aräan Reihnardt

[Aräan]

En ce début de soirée, l'atmosphère se fait lourde. L'épaisse couche nuageuse ne laisse passer que quelques rares rayons de lumière. Le temps semble à la pluie. On entend le grondement sourd du tonnerre au loin, peut être passera-t-il laver quelque peu la corruption qui empoisonne ces terres.

Le silence est lourd, pas de vent, aucune forme de vie ne semble avoir eu l’audace de se révéler. Pas un insecte, pas un oiseau, rien. Seul résonne le martèlement du ciel au loin. Entre les coups de tonnerre, on commence à entendre un pas, qui avance lentement. On devine les coups de sabot d'une monture. Sa silhouette finit par se dégager des ombres.

Avachi sur le canasson, le cavalier ne semble pas bouger. Sa monture semble fatiguée elle aussi, et c’est avec peine qu’elle parvint à avancer. L’homme qui semble être endormi, ou inconscient, à les cheveux sales, collés entre eux par on ne sait quelle matière. Son visage est caché par des mèches qui tombent sur les côtés de sa tête. Il semble très mal en point.

Suivant le seul chemin qui s’offre à elle, la bête finit par arriver face à une gigantesque porte qui barre sa route. Ne comprenant pas pourquoi la route s’achève ici, elle rumine quelques instant en tournant sur elle-même avant de gratter la porte de son sabot. Les derniers rayons visibles finissent par éclairer le visage du cavalier, qui, réveillé par leur chaleur et ébloui, chute lourdement de sa monture et se retrouve inconscient au sol.

[Solÿn]

Le morne silence -à peine troublé par l'orage distant- qui régnait en haut des remparts n'était pas étranger aux sentinelles : les journées étaient relativement calmes au Beffroi ces dernières semaines, à l'exception prêt d'une poignée de goules en maraude : on ne changeait pas ces habitudes là, aux Maleterres.
Les guetteurs se contentaient souvent de vagues signes de tête et autres monosyllabaires pour communiquer, car comme le Commandant Fusil-de-Bronze aimait leur répéter, ils n'étaient pas payés pour se raconter des blagues mais pour protéger leurs compagnons.

Aussi, le bruit lent et régulier des sabots d'un cheval cheminant sur la route qui menait aux portes du Beffroi les mit rapidement en alerte. Après tout, les visiteurs bien vivants n'étaient pas monnaie courante dans le coin ! Penchés sur le parapet et leurs flèches déjà encochées, le groupe en faction put admirer la bête et son cavalier bringuebalant tandis qu'ils approchaient des grilles, et certains eurent une petite moue peinée lorsque ce dernier glissa de sa monture pour s'écraser au sol avec un bruit sourd.

-"Avertissez l'adjoint Rainer et le médecin De Malarme, je crois qu'on a ramassé un autre réfugié", commenta sobrement le vétéran de la troupe, qui s'assura que le plus jeune d'entre eux se verrait attribuer la tâche ingrate de transmettre le message.
-"Vous trois avec moi, arme au poing", fit-il en désignant tour à tour les sentinelles en qui il avait le plus confiance, "Les autres, gardez vos arcs prêts à tirer et un oeil sur les environs. Qui sait ce que les Maleterres ont encore fait s'échouer à nos portes ?" ajouta-t-il avant de descendre les marches du chemin de ronde vers l'entrée du Beffroi.

L'instant d'après, la herse se leva de quelques mètres pour laisser passer les quatre gardes, l'épée dégainée et l'oeil attentif. Le vétéran s'approcha du cavalier désarçonné et le remua légèrement du bout de sa botte de plaques.

-"Hé, mon gars ? Vous m'entendez ? Toujours avec nous ?" demanda-t-il d'une voix forte tandis qu'un de ses collègues attrapait les rênes du cheval pour ne pas qu'il écrase l'homme de ses puissants sabots.

[Aräan]

"Hé, mon gars ? Vous m'entendez ? Toujours avec nous ?" Demande la vigie en le secouant légèrement du bout de sa botte. Question qui restera sans réponse, le cavalier ne réagit pas, il est allongé ventre au sol.

De si près, la vigie pourra remarquer plus en détail l'état dans lequel il est : ses cheveux sont collés en mèches par ce qui semble être du sang séché, ils semblent avoir brûlés sur un côté de sa tête. Son visage est plein de terre et de boue, son armure qui est apparemment très vieille, et en plus très abîmée, porte des traces de morsures, d'éraflures ...Bien des marques qui ne peuvent dissimuler le sang qui a coulé de certaines d'entre elles. Une cape en piteux état, brodée des armoiries de l'ancien royaume déchu d'Alterac ceint son dos.

Sa monture semble chargée, de grandes poches en cuir sont rattachées à la selle, après inspection, les curieux pourrons y trouver diverses pièces d'équipement neuves, ainsi qu'une affiche de recrutement à moitié déchirée de l'ost pourpre.

[Solÿn]

Les sourcils froncés, le vétéran se pencha vers la silhouette visiblement inconsciente au sol. "Pas de réponse, mauvaise réponse" comme aimait dire feu son père. Heureusement pour le cavalier échoué, une respiration saccadée soulevait et abaissait encore son torse, preuve qu'il appartenait toujours au monde des vivants.

-"Notre visiteur est dans les choux et salement amoché mais toujours parmi nous", commenta-t-il d'un ton monocorde à l'adresse de ses compagnons.

La sentinelle qui s'occupait du cheval fouilla quelques instants dans les sacoches transportées par la docile monture avant d'en ressortir un exemplaire des tracts de l'Ost distribués quelques semaines plus tôt à Hurlevent, en aussi mauvais état que son propriétaire. Avisant le parchemin laminé, les gardes échangèrent un regard entendu : l'inconnu s'assurait pour le moment de ne pas finir en engrais naturel dans le potager du Beffroi.

-"Ce type n'a donc pas atterri par hasard sur le pas de notre porte... bon, amenons-le à l'infirmerie en douceur, en espérant pour lui qu'il soit encore sauvable."

Après l'avoir fouillé et récupéré tout objet suspect ou pouvant servir d'arme, trois d'entre eux le soulevèrent non sans peine tandis que le dernier menait sa monture ainsi que ses biens à l'écurie, où elle serait confiée aux bons soins d'un page. La lourde grille se referma derrière l'étrange cortège qui chemina lentement vers la Garnison, et plus précisément l'infirmerie du médecin De Malarme.




-"Sainte Mamie de la Lumière, quelle espèce de vagabond vous m'avez encore déniché ?" demanda Solÿn depuis l'encadrement de la porte, d'une voix où se mêlaient l'humour et le reproche.

Comme à son habitude l'infirmerie était calme, propre et bien éclairée; rien à voir avec ces sordides hôpitaux militaires où le chirurgien tenait plus du garçon boucher et les lits du clapier. Ici le responsable connaissait son affaire et la menait d'une main ferme et assurée. Malgré le danger permanent que représentent les Maleterres, seuls deux résidents émaillaient l'officine ce jour-là; l'un pour une mauvaise chute du toit de la forge, l'autre pour avoir confondu épée d'entraînement et arme affûtée.
Aussi le chevalier De Malarme trouva la distraction fort bienvenue... en espérant évidemment qu'elle n'amène pas avec elle un sac d'embrouilles.

-"Déposez-moi ce bonhomme sur la table d'opérations, retirez-lui son équipement superflu et attachez-le solidement, je ne voudrais pas qu'il ait un mauvais geste pendant que je m'occupe de son cas."

Les trois soldats procédèrent sans sourciller, habitués au ton impérieux de leur supérieur hiérarchique, pendant que le médecin s'équipait en conséquence d'une paire de gants chirurgicaux, d'un tablier et d'un masque propres. Son oeil unique s'arrêta un instant sur la cape de l'inconnu et son emblème altéran brodé, provoquant chez lui un petit rictus en coin.

-"Ne soyez pas tendres avec ces noeuds, mes compatriotes sont des gens plein de ressources après tout."

Le Syndicat n'opérait que très rarement dans les environs -bien trop loin des frontières des monts d'Alterac- mais un excès de prudence pouvait faire la différence entre le calme et les problèmes. Et tant que possible, Solÿn avait l'habitude de se tenir aussi loin que possible des problèmes.
Une fois le patient correctement préparé, les gardes se retirèrent après un dernier salut protocolaire et filèrent sans demander leur reste, laissant le médecin à son travail.

-"Bien, voyons voir ce qui vous est arrivé messire, et comment y remédier." énonça-t-il tout haut, sans vraiment espérer de réponse en retour.

[Aräan]

En retirant ce qu'il restait de son armure, les trois soldats s'étonnèrent de voir que le malheureux ne portait rien en dessous. L'idée leur monta vite à l'esprit qu'il s'agissait d'un esprit loufoque avec des fantasmes étranges, mais il n'en n'était rien. De toute évidence, et comme le démontrait son armure qui était mal attachée à certain endroits, l'homme avait dû se préparer en vitesse. Mais dans ce cas pourquoi essayer d'enfiler une armure plutôt que de simples vêtements ? Des questions qui resteront sans réponses pour le moment.

"Bien, voyons voir ce qui vous est arrivé messire, et comment y remédier."

Le chevalier commença à inspecter le gaillard étendu face à lui, car en effet le bonhomme était de robuste stature. Il était de taille moyenne quoique légèrement plus grand que la moyenne. Des bras épais, terminés par des mains calleuses, et pleines de cicatrices. Le chevalier nota trois verrues qui poussaient sur trois de ses doigts, elles semblaient assez vieilles. Signe commun chez les gens qui travaillent la terre. Son visage était sale, couvert de boue séchée, le côté de sa tête semblait avoir échappé de peu aux flammes, une petite trace de brûlure apparaissait à son oreille gauche, les cheveux qui l'entourait semblait avoir brûlé.

Les dégâts les plus importants était au niveau de son torse, du sang avait séché autour des plaies, le médecin pourra en compter cinq : deux plaies circulaires au niveau de la clavicule droite, dont une odeur nauséabonde s'échappait. La peau autour était enflée, et virait à un violet-pourpre inquiétant. Deux plaies de par et d'autre de son flanc, le médecin pourra y reconnaitre une blessure de flèche, flèche qui semblait avoir été brisée à l'intérieur de la plaie, en effet, une partie de la tige brisée semblait dépasser très légèrement d'un côté. En retournant le cavalier, qui ne manqua pas de grogner, le médecin pourra découvrir une longue lacération dans le dos du pauvre bougre. Partant de l'épaule droite avant d'arriver un peu au milieu du dos. Une trajectoire diagonale. Par chance, elle semblait avoir évité de justesse la colonne vertébrale.

En plus de ces blessures ouvertes, le corps du patient était couvert d’ecchymoses, certaines semblait quelques peu anciennes, d'autres, la plupart d'entre elles, étaient récentes. Il y en avait aux endroit où l'armure avait pu le protéger.

[Falstaf]

L'agitation aux portes s'était répandue dans une bonne partie du Beffroi, atteignant même certains de ses recoins les plus sombres.

C'est ainsi qu'un certain baron eu vent de l'arrivée d'un malheureux, dont les rumeurs disaient qu'il ne passerait peut-être pas la nuit. Soucieux de préserver ses intérêts en pareils cas, Falstaf se précipita vers l'infirmerie, bien décidé à être présent dans le cas où, par malheur, l'inconnu trépasserait sous les doigts experts du médecin.

Il arriva peu après que Solÿn ait constaté l'étendue des dégâts.

Mon cher docteur, commença-t-il, affable, après avoir jeté un oeil sur l'individu qui s'était échoué devant chez eux, personne ne vous reprochera d'échouer en pareil cas. Cela étant, vous connaissez mon savoir en anatomie, et je me fais fort de vous aider si vous avez besoin d'une main supplémentaire.

[Solÿn]

Une moue concernée fleurit rapidement sur le visage du médecin et s'élargissait à mesure qu'il poursuivait son inspection.

-"Hé bien, on dirait que vous avez livré un rude combat ! Et ces vilaines entailles à l'épaule se sont déjà infectées..."

Autant pour le calme et la tranquillité, ce patient allait lui demander de nombreuses heures de travail ne serait-ce que pour s'assurer qu'il ne rejoindrait pas ses ancêtres prématurément. Procédant avec méthode, il commença d'abord par rassembler tout le nécessaire : des linges propres pour les bandages, de l'eau portée à ébullition pour nettoyer ses instruments, de quoi inciser et retirer les restes du projectile du flanc, des cataplasmes médicinaux pour combattre l'infection, du fil et une aiguille pour recoudre et pour finir de quoi cautériser les plaies.

Tandis qu'il finissait de préparer sa table d'opération, il sentit comme un frisson dans son dos ce qui le fait se retourner brusquement, scalpel à la main. La vue du visage souriant du baron de Winhler n'apaisa pas son trouble, bien au contraire.

Mon cher docteur, personne ne vous reprochera d'échouer en pareil cas. Cela étant, vous connaissez mon savoir en anatomie, et je me fais fort de vous aider si vous avez besoin d'une main supplémentaire.

-"Ah, écuyer. Votre mansuétude me touche mais j'escompte bien tirer notre invité de ce mauvais pas."

Solÿn coula un regard vers l'unique bras qui restait à son vis-à-vis, l'air entendu.

-"Si vous pouvez m'être d'une quelconque utilité malgré votre... situation, je pourrais en effet avoir besoin d'un assistant que la vue des entrailles et autres fluides n'effarouche pas. Connaissant vos allégeances passées, je ne doute pas que cela soit votre cas ." ajouta-t-il en tendant un tablier neuf à Falstaf, l'air légèrement pincé.

-"Veillez tout de même à ne pas reprendre vos vieilles habitudes, je suis sûr que les officiers aimeraient le rencontrer vivant plutôt que non-mort."

[Falstaf]

Le baron affecta un air navré, comme si le rappel de ses états de service antérieurs le blessait.

Mon ami, il me semblait que nous étions au-delà de cela, désormais... Mais montrez-moi donc ce qui vous embarrasse dans ce cas.

Avec une agilité étonnante compte tenu de son handicap, Falstaf respecta scrupuleusement les conditions d'hygiène indispensables avant de s'approcher de la table où gisait le blessé. Sa facétie naturelle céda bien vite la place à l'oeil entraîné de l'expert. Pour autant, c'est avec humilité qu'il se tourna vers le médecin en titre.

Je suis prêt, donnez-moi vos indications. Je les appliquerai.

[Solÿn]

Je suis prêt, donnez-moi vos indications. Je les appliquerai.

Malgré le peu de sympathie que lui inspirait le baron, Solÿn lui reconnaissait de grandes qualités pratiques. Voilà quelques temps qu'il n'avait pas exercé son art -du scalpel plutôt que du luth- en duo, et la présence d'une troisième main pour le seconder fit remonter en lui les souvenirs de ses débuts au poste de médecin, assisté à l'époque par la pétillante infirmière gnome Clarÿssa.

-"Fort bien, mettons-nous à l'ouvrage. Il faut d'abord contenir l'infection à l'épaule, retirer les chairs déjà atteintes par la gangrène et appliquer les onguents adéquats pour guérir le tout. J'incise dans le vif et vous épongez les liquides afin que nous y voyions toujours clair..."

L'ouvrage était délicat et demandait une grande précision pour sauver l'essentiel, à savoir les muscles et les tendons permettant d'actionner l'épaule. Heureusement pour le patient, les blessures étaient encore suffisamment fraîches et l'infection n'avait eu le temps d'atteindre que l'épiderme et le derme.
Une fois le début de gangrène retiré et l'épaule traitée, le médecin laissa son assistant nettoyer derrière lui pour se concentrer sur la flèche brisée dans le flanc du blessé; le front luisant de sueur mais les mains fermes, il retira le reste de la tige ainsi que la pointe d'un mouvement de pince dont il avait le secret -ce n'était pas le premier projectile qu'il retirait de la sorte. L'épais filet de sang qui s'écoula de la blessure à vif ne le rassura qu'à moitié : sa couleur d'un pourpre tirant sur le noir ainsi que l'absence d'odeur caractéristique écartaient l'hypothèse d'une autre infection sur cette blessure, néanmoins tant de liquide perdu affaiblissait encore plus le corps de l'homme...

Les deux hommes s'activèrent ainsi à l'unisson pendant de nombreuses heures, oeuvrant ici et là sur ce champ de bataille à échelle humaine, tandis que la fatigue les gagnait progressivement. S'ils furent relativement bavards au début de l'opération, commentant régulièrement leurs gestes et leurs découvertes de l'état exact des blessures, ils ne finirent par ne plus échanger que des monosyllabes. Après avoir opéré de concert, ils durent se relayer progressivement, profitant à chaque fois de quelques instants de répit pour se sustenter brièvement avant de repartir au combat.
Ainsi passa la nuit et un timide rayon de soleil traversa l'unique fenêtre de l'infirmerie pour éclairer le résultat : deux hommes fourbus, leurs tenues maculées de sang séché, l'oeil quelque peu vitreux contemplant leur patient. Pâle comme la mort, toujours dans un état second et guère présentable et une respiration faible somme toute régulière.

Rejetant sa tête en arrière et poussant un soupir affligé, Solÿn entreprit de retirer ses gants et de dénouer son tablier, les bras légèrement tremblants.

-"Sainte Mamie de la Lumière, je ne me souviens pas d'avoir déjà donné autant pour un illustre inconnu. J'espère qu'il en valait la peine, au moins !"

Il coula un dernier regard vers le blessé avant de se retourner vers Falstaf, un bâillement aux lèvres.

-"Je vais faire mander un page pour lui faire passer un bon coup d'éponge et lui enfiler une tenue propre. Maintenant le pauvre diable est entre les mains de son créateur."

[Aräan]

Les limbes, territoires infinis entre les rêves et la mort, étaient désormais le lieu au séjournait l'esprit d'Aräan. Sa conscience flottait seule, ballotée au grès des cauchemars qui l'entouraient. Cet état transitoire semblable au sommeil n'en était pourtant pas, son corps était passé dans un état de survie absolue. Les fonctions vitales étaient préservées, et toutes les ressources du corps était dédiées à la gestion des blessures qu'il avait subit. Bienheureusement, le travail accomplit par les deux membres de l'ost avait grandement facilité la guérison.

Après quelques heures passées dans cet état second, les limbes qui le retenait prisonnier finirent par le libérer. La lumière extérieure parvenait à traverser à nouveau ses paupières. Ce n'est qu'après de nombreux clignements de ces dernières qu'il parvint à voir où il se situait. Son esprit était encore embrumé, et c'est à peine s'il eu fait un mouvement pour essayer de se relever que la douleur de ses blessures se réveillât pour lui arracher un gémissement. Après qu'elle fût passé, il retenta l'expérience, mais plus doucement cette fois-ci. Il réussi au bout de quelques minutes, non sans avoir sué, à s'assoir dans une position pas trop inconfortable. Alors, ne voyant personne dans la pièce autour de lui, il essaya d'appeler quelqu'un.

"Ohé, y'a quelqu'un ?!"

[Falstaf]

L'attente parut une éternité, alors qu'elle ne dépassa pas la minute. Soudain, un bruit derrière une porte, puis celui de la porte même qui s'ouvre. Apparut alors un homme âgé, quoique toujours fringant et élégant, un éternel sourire moqueur posé sur sa moustache parfaitement taillée. Soucieux des convenances, il renonça à s'approcher trop abruptement du blessé, dont il devinait le trouble.

Monsieur, fit-il d'une voix amusée, nous n'entamons guère notre relation sous de bons auspices : j'étais persuadé que vous ne passeriez pas la nuit, à tel point qu'un pari avait été ouvert avec Monsieur le médecin du Beffroi. Vous venez de me faire perdre quelques pièces.

Puis, quittant son rôle de fantasque pour celui de savant, il consentit à faire quelques pas vers l'inconnu.

Cela étant, je ne peux que saluer votre vivacité. D'autres ne seraient pas revenus de telles blessures. Avant de vous remettre entre les mains des autorités locales pour un interrogatoire en bonne et due forme, je me dois tout de même de m'assurer de votre état : comment vous sentez-vous ?

[Aräan]

Aräan se cramponnait au draps du lit pour se maintenir en équilibre, il avait encore du mal à se concentrer et il manqua de lâcher prise sous l'irruption de l'inconnu.

Monsieur, fit-il d'une voix amusée, nous n'entamons guère notre relation sous de bons auspices : j'étais persuadé que vous ne passeriez pas la nuit, à tel point qu'un pari avait été ouvert avec Monsieur le médecin du Beffroi. Vous venez de me faire perdre quelques pièces.

La surprise et son esprit encore embrumé lui rendirent impossible la compréhension de la première phrase prononcée. Et c'est à peine s'il eu reprit ses esprits que la silhouette jusqu'alors floue s'approcha et devint nette.

Cela étant, je ne peux que saluer votre vivacité. D'autres ne seraient pas revenus de telles blessures. Avant de vous remettre entre les mains des autorités locales pour un interrogatoire en bonne et due forme, je me dois tout de même de m'assurer de votre état : comment vous sentez-vous ?

- "Qu-" Sa bouche était atrocement sèche, essayer de parler lui donnait l'impression de mâcher du gravier. Aussi, il tourna la tête autour de lui et aperçut une carafe sur la tablette posée à côté de son lit. Il fit un signe de main au vieil homme pour lui signifier de patienter et saisi la carafe, non sans difficultés, qu'il apporta à sa bouche avant d'engorger de larges quantités d'eau. Après s'être désaltéré, il reposa la carafe sur la table.

-"Bah comme un gars qui r'viens d'entre les morts hein. C'est pas jojo là-bas moi j'vous dis."

Il baisse la tête pour regarder les bandages et autres qui lui ceigne le corps

-"Ouah putain ! Vous avez fait du sacré boulot ma parole ! J'ai eu de la chance de me réveiller à temps bordel !"

Il prit ensuite le temps de regarder plus précisément le lieu dans lequel il se trouvait.

-"J'suis bien à l'Ost Pourpre ? Me suis pas gourré hein ?"

[Falstaf]

Le sourire de Falstaf se figea. Diantre. Un homme du peuple. Ethnologue dans l'âme, le baron se fit fort de communiquer avec l'étranger : après tout, il avait déjà fort à faire avec les escogriffes de l'Ost.

Je vous confirme que vous êtes au Beffroi du Nord, siège de l'Ost Pourpre. Je me présente : Falstaf de Winhler, alchimiste attitré de l'ordre. C'est à ce titre que j'ai eu l'honneur de seconder le médecin dans la délicate opération visant à vous sauver la vie.

Avisant une chaise, le baron l'attrapa de sa main unique, et s'installa à côté du lit du blessé.

J'en déduis que vous nous cherchiez. J'anticipe quelque peu le rôle de la soldatesque, mais me diriez-vous qui vous êtes, et ce que vous venez faire ici ? Ce n'est pas vraiment une zone touristique.

[Aräan]

Aräan opina de la tête. Se rendant compte qu'il n'avait pas à faire à quelconque infirmier mais à ce qui, dans ses codes, correspondait à un aristocrate, il commença sa phrase en essayant pathétiquement de faire bonne impression avec le peu de langue qu'il avait pu apprendre précédemment.

Je suis Aräan Reihnardt, paysan de métier. J'ai déjà fais mes armes chez Ravenfold. J'viens chez vous parce que j'ai entendu dire que vous cherchiez à reconquérir les royaumes du nord

Après cette brève présentation, il tenta de ramener ses pieds en dehors du lit pour pouvoir s'assoir droit. Il continua ensuite sa description.

Si vous voulez savoir comment j'suis arrivé ici dans cet état c'p'utôt simple. J'suis passé par les montagnes d'Alterac, les terres du bastion de Ravenfold, avant de rejoindre les malterres. Vu que j'sais monter que depuis peu, j'ai p'tet trop tiré sur le pauv' canasson. Résultat on a dû coucher dans les Malterres là, la bête était épuisée. Seulement j'connais pas trop vot' coin moi. J'ai dû coucher pas loin d'un cimetierre ou j'sais pas quoi parce que j'ai été attaqué à l'aube, même pas à l'aube y faisait encore nuit ! Dit-il en faisant de grand gestes pour mimer la surprise et la peur qu'il avait ressenti.

Fin bref, j'me suis étalé dans les cendres encore brûlantes du feu de la veille en voulant foutre mon armure là, et j'ai failli pas r'joindre mon destrier avec le truc qui me bouffait l'épaule ! Après j'me suis paumé j'crois vu qu'on galopait un peu à l'aveugle. C'pour ça que j'ai failli crever. Dit-il en montrant ses blessures. Vous remercierez celui qui m'a rafistolé pour moi hein !

[Falstaf]

Falstaf écouta la description avec intérêt. L'homme était un sacré gaillard : d'autres auraient succombé à de telles blessures. Cependant, il indiquait avoir été mordu : cela pouvait laisser présager d'une contamination. Le baron jugea bon de le garder pour lui, et de placer l'individu sous surveillance médicale.

C'est un sacré périple que le vôtre. Je comprends que vous êtes un soldat de métier : pouvez-vous me donner des précisions sur ce Ravenfold dont vous parlez ? Je vis parfois en ermite, et je ne me tiens pas toujours informé de ce qui se passe dans le vaste monde.

Par ailleurs, pourquoi avoir entrepris un tel voyage ? Quel est votre intérêt à nous rejoindre ?

Le baron se surprit à lancer une floppée de questions. Lui qui était simplement venu s'enquérir de l'état du blessé, le voilà à assurer son entretien.